Les problèmes de la Basse Durance : 2 – les projets dans le lit majeur

Les projets de construction dans le lit majeur de la Durance (comme dans la plupart des rivières) posent en général les problèmes suivants:

  1. Ils restreignent le passage de l’eau en cas de forte crue.
    On peut prévoir que les inondations auront des conséquences plus graves. Construire des digues protège alors un endroit donné, mais aggrave en général le problème en aval.
    Pour justifier leur projet, les maires jouent sur le fait que longtemps EDF a prétendu avoir « dompté » la Durance. La crue de 1994 à 3000 m3/s a prouvé qu’il n’en était rien…
  2. Ils impactent les nappes phréatiques en quantité et qualité.
    Depuis l’aménagement de la Durance on sait que la nappe n’est, en quantité, plus que l’ombre d’elle-même et on a parfois été obligé de prévoir des seuils sur la rivière (voir article précédent) ou des barrages, pour maintenir artificiellement et localement cette nappe.
    Dans le cas des lourds travaux de génie civil (ligne TGV, autoroute…) les fondations de ces équipements provoquent des modification de l’écoulement de la nappe. Souvent, les riverains doivent alors pomper toujours plus profond pour trouver une eau de toujours plus mauvaise qualité (l’augmentation des pompages pouvant aussi avoir un impact)
    Dans le cas d’une extraction de granulats, là on observe carrément une mise à l’air libre de la nappe phréatique liée à la rivière. Une pollution éventuelle n’est alors plus filtrée par la terre et cette pollution peut très facilement atteindre les forages des riverains. Or les extractions de granulats sont souvent associées à des unités de fabrication de bitume.
  3. Ils artificialisent des terrains naturels ou agricoles
    Le plus logique dans le lit majeur est d’avoir soit des terrains naturels, laissés à la vie sauvage, soit des terrains agricoles. Une crue n’impactent que peu ces derniers, qui même peuvent se retrouver amendés par les limons ou sables déposés par la rivière (enfin ça, c’était quand les rivières avaient des crues annuelles, comme le Nil en Egypte ou… la Durance avant l’aménagement…).
    La disparition rapide des terrains naturels ou agricoles au profit de constructions (dont l’utilité peut souvent être questionnée, combien de construction spéculatives ou de prestige?) est devenu un enjeu majeur pour l’alimentation des générations futures. Tout importer n’est pas acceptable pour nous et n’est pas accepté par toute une population soucieuse de relocalisation (et qui s’approvisionne en AMAP ou équivalent).

C’est au regard de ces grandes lois qu’on peut juger des 3 projets ci-dessous, qui ne sont sans doute pas les seuls, mais sont sans doute les plus gros et en tous cas exemplaires.
Les lecteurs de cet article qui souhaiteraient voir ajouter un projet peuvent nous écrire un commentaire à ce sujet.

1  L’extension de la carrière de granulats de Mallemort

A Mallemort, en aval du déversoir, se trouve une carrière appartenant à la société Lafarge : Lafarge Granulats Sud (LGS). Cette société a prévu une large extension de ce site.

Depuis un arrêté de septembre 1994, dont on retrouvera l’essentiel ici, les extractions de granulats sont interdites dans les lits mineurs et très réglementées dans les lits majeurs.

Une association de riverains, l’AMDE (Association Mallemortaise de Défense de l’environnement), que nous soutenons évidemment dans son combat, a fait un point précis sur les problèmes posés par le projet LGS, nous vous invitons à le lire : communication AMDE sur projet extension Lafarge . Et les informations les plus récentes peuvent être lues, comme pour le point précédent, sur le site du Collectif Notre Dame des Landes (NDDL) « Lubéron Durance »

La vue d’avion montre la proximité de la centrale à granulats et le lit mineur :

mallemort annoté

Il est évident pour nous que le projet LGS est situé trop près du lit mineur. Comme l’AMDE, nous n’avons qu’une confiance très limités dans les promesses ou engagements de cette société, ni dans les moyens ou la volonté des élus de faire respecter les engagements (ou les devoirs légaux) d’une société de cette taille et autant liée aux travaux publics…

2 Le projet LEO à Avignon

Le projet de la Liaison Est-Ouest (LEO) au sud d’Avignon, le long de la Durance, est ancien (années 80). Il pose plusieurs problèmes écologiques, notamment:

  • Le projet, largement sur le lit majeur de la Durance, condamne des zones naturelles et toute une zone agricole naguère appelée « ceinture verte ». Devant l’insécurité financière que le projet faisait peser sur leurs terres, beaucoup d’exploitants agricoles ont arrêté leur exploitation… et/ou pas voulu la transmettre.
  • Les liaisons rapides sont toujours des « aspirateurs à voitures », c’est-à-dire que loin de résoudre les problèmes de circulation locaux, ils les renforcent en général, les automobilistes étant tentés de « faire un détour pour passer par la LEO », ou n’hésiteront pas à choisir d’habiter plus loin de la ville « parce qu’il y a la LEO ». De ce point de vue le projet « sent » les années 80 (et les élus qui le défendent aussi).

schéma projet LEOavignon annoté

La tranche 1 (Echangeur de Courtine nord – Echangeur de Rognonas) a été terminé en 2010.

La tranche 2 (prologment à l’est et nouveau franchissement de la Durance pour rejoindre la RN7) et la tranche 3 (franchissement du Rhône à l’ouest) n’ont pas été jugées prioritaires par le rapport Duron « mobilité 21 »

Le projet LEO semble à L’Etang Nouveau l’image du projet pharaonique qu’apprécient certains élus mais guère les gens, surtout s’ils ont une sensibilité écologique. Il est aussi lié au « tout voiture » et plus loin au « libre échange » qui sont aujourd’hui plus synonymes de délocalisation que de progrès.
La disparition des terres du lit majeur liée à ce projet, et les digues qu’il impose, ne sont pas une bonne gestion de la rivière. Nous ne pouvons que le condamner.

3 Les extensions des zones commerciales et industrielles de Plan d’Orgon et de Cavaillon

Nota: cette partie (y compris son titre) a été modifiée depuis son écriture initiale, pour le rendre plus conforme à la réalité, et suite à des informations transmises par des militants que nous remercions.

Un projet de centre commercial (un Hyper U) à Plan d’Orgon (rive sud, côté Bouche du Rhône), a récemment déchainé l’opposition du maire de Cavaillon (rive droite, Vaucluse), puisque les contraintes que la préfecture du Vaucluse a exigé pour un projet comparable (la construction d’une digue) n’est pas exigée par la préfecture des BdR pour le projet de plan d’Orgon.

Voir ici : http://www.francebleu.fr/faits-divers/inondations-pluies-crues-rivieres/la-durance-peut-aussi-bien-deborder-plan-d%E2%80%99orgon-qu%E2%80%99-cavaillon-963734

La construction d’une grande surface n’est en général pas considéré comme une bonne nouvelle pour notre association, car nous considérons les grandes surfaces en général comme destructrices de l’environnement (quasi obligation de faire ses courses en voiture, énorme emprise au sol sur des terrains fertiles en général). Cependant le projet de Hyper U de Plan d’Orgon est prévu relativement loin de la Durance (hors du lit majeur, semble t’il), sur un ancien terrain industriel, donc sur un terrain perdu depuis longtemps pour la nature et l’agriculture. C’est donc le cas le « moins pire » pour notre association.

Le projet de grande surface de Cavaillon situé au lieu dit La Voguette et l’urbanisation prévue à sa suite sont sans doute plus gênants. Le projet, ancien (avant 2000), est mené par le groupe Auchan. Il est situé en zone inondable puisqu’il n’a été jugé acceptable par les services préfectoraux qu’à la condition de la construction d’une digue de protection contre les crues. Cette digue chiffrée à 7 millions d’euros, n’est pas encore construite, mais le financement serait réuni. Cette digue permettrait l’urbanisation de 100 ha, qui sont actuellement des terres agricoles et seraient situées dans le lit majeur.

Plus d’information sur le site du collectif NDDL Luberon Durance

Aucun des 2 projets n’est situé en bordure immédiate de la Durance. Des 2 cotés de la rives des zones industrielles ont été construite dans le lit majeur, en zone inondable, on trouve aussi l’A7 et la ligne TGV en rive gauche (coté plan d’Orgon) et une ligne TER en rive droite (coté Cavaillon) et les 2 projets sont situés à l’extérieur de ces ouvrages.

cavaillon centrée plus sud

On peut retirer de ce cas que les projets situés assez loin de la rivière peuvent néanmoins être situés en zone inondable. Le projet Auchan, urbanisant des terres agricoles et nécessitant une digue supplémentaire sur la Durance qui n’aurait pas été prévue sans ce projet et qui semble devoir être payée par les deniers publics, ne peut être accepté par notre association. Que des zones industrielles soit déjà implantées plus près de la rivière ne signifie pas qu’on doivent persister dans l’erreur.

Un commentaire

  1. Bonjour
    Je lis avec intérêt vos articles mais il y a des points sur lesquels je ne suis pas d’accord
    Peut être que 1,5 ou 2 milliards d’euros sont trop chers payé pour sauver 2 centrales électriques c’est possible .
    Actuellement EDF déverse dans l’étang 1200 millions de m2 ce qui est trop .
    Le fait que ces 2 masses d’eaux ne se mélangent pas sauf période de vent dépassant 40 Km/h ,provoquent des périodes d’anoxie pour le fond de l’étang avec toutes les conséquences que cela engendre (mortalité massive de coquillages et ça c’est pour la partie visible ). Rien que cela empêchera l’étang de trouver un équilibre.
    L’eau douce apporté par la Durance est de bonne qualité mais elle contient des nitrates et phosphates qui s’accumulent dans l’étang et provoque une augmentation trop importante du phytoplancton ce qui trouble l’eau empêchant la lumière de pénétrer en profondeur .Sans parler des ulves .

    Pascal BAZILE donne beaucoup de sa personne en plongeant dans l’étang et observe le milieu . Je fait de même à part que mon intérêt est moins désintéressé puisque je pratique la chasse sous marine mais cela me m’empêche pas d’observer les herbiers et ça je l’affirme ils font « la gueule  » .
    et a l’heure actuelle ils ne sont pas prés de ,à nouveau recoloniser l’étang .
    Tout ce que l’on peux souhaiter c’est qu’ils ne disparaitre pas , ce qui est moins sur .
    Bref tout ça pour dire ; rouvrez le contentieux européen pour obliger l’état Français a prendre de nouvelle mesures et arrêter les rejets d’eau douce et si la solution de STEP est réaliste croyez moi ils vont l’adopter .
    L’étang va mieux , l’eau c’est éclaircie , elle est de bonne qualité pour la baignade mais c’est tout .L’étang n’est pas et ne se rééquilibrera pas tout seul .
    Autant entre l’ARC et la pointe de Berre en fin de l’été 2013 l’eau est restée relativement claire , du coté St CHAMAS et Istres et St Mitres c’était plutôt couleur « mare aux canards » .
    On a la chance d’avoir cette opportunité il serait dommage de ne pas la saisir et pout tout vous dire j’aurai du mal à le comprendre .
    Sur ce bonne continuation .
    AFFRE J.Claude .

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